Enjeux sociaux et éthiques du diagnostic présymptomatique – Synthèse de la littérature

Pourquoi rechercher le statut génétique des membres d’une famille touchée par une maladie héréditaire et leur transmettre cette information, en particulier lorsqu’aucun traitement n’existe ? Sur quelle base une personne concernée prend-elle la décision de savoir ou d’ignorer son statut génétique et d’en informer ou non les membres de sa parentèle ? Quels sont les effets du diagnostic présymptomatique sur les personnes concernées ; de quelle manière cela transforme-t-il ou pas leur existence ? Ces trois questions sont au point de départ de la revue de la littérature sur les enjeux sociaux et éthiques du diagnostic présymptomatique, dont ce texte présente une synthèse. L’analyse porte sur un corpus de 57 articles et 7 rapports collectés sur Scopus, Cairn et les sites internet d’institutions. Elle distingue deux approches principales.
La première consiste à considérer la décision comme un processus rationnel dans lequel sont pesés les risques et les bénéfices associés, lesquels ont en quelque sorte une existence objective même s’ils doivent s’apprécier de manière spécifique pour chaque personne concernée. Dans cette configuration, le praticien est a priori aussi bien placé que la personne concernée pour déterminer la “bonne décision”, avec lui ou éventuellement à sa place. Une seconde approche consiste à considérer que la décision n’est qu’un point dans un long processus qui amène peu à peu les personnes à réaliser au double sens du terme – prendre conscience de, rendre réel – ce que signifie cette maladie dans leur vie et la manière dont le diagnostic présymptomatique peut en infléchir le cours. Dans cette approche, il se construit un cheminement partagé entre les soignants et les personnes concernées dont la finalité est d’explorer ensemble la signification que peut revêtir le diagnostic.
La question des essais cliniques comme potentielle motivation pour la réalisation d’un diagnostic présymptomatique vient complique l’analyse en faisant apparaître des bénéfices collectifs de long terme face à des risques individuels immédiats. Cet élément doit-il être intégré, et si oui comment, dans les parcours proposés aux personnes concernées en vue d’un éventuel diagnostic présymptomatique ? Les protocoles discutés dans cette revue fournissent des points de repère utiles quant à un cadrage éthique par et dans les pratiques : l’inscription dans un temps relativement long de la procédure, le processus d’exploration collective de ce que peut impliquer la décision, et la non interférence des chercheurs paraissent être des principes à retenir.