Une anthropologie politique de la finance : profits, États et cultures dans l’investissement transfrontalier à Shanghai

Cette présentation propose d’explorer les éléments d’une anthropologie politique de l’industrie financière globale à partir d’une réflexion conceptuelle sur l’analyse de la distribution des ressources monétaires, en se basant sur une enquête par observation participante dans une entreprise de conseil en fusions et acquisitions basée à Shanghai.

L’enquête montre que les transactions réalisées et explorées par les personnes observées mobilisent des imaginaires sur les « profits », les « États » et les « cultures ».

Ces imaginaires concernent autant leur vie professionnelle que non professionnelle, et sont multiples, parfois contradictoires, et mutuellement constitutifs. Les imaginaires sur le profit peuvent mobiliser des visions familiales des entreprises achetées, des analyses financières visant l’évaluation des actions cotées en bourse, des rapports industriels entre différentes technologies et des trajectoires de carrière des employés qui mènent les transactions.

Les imaginaires sur les États concernent les cadres juridiques, utilisés comme supports ou comme contrainte à éviter, des partenaires commerciaux lorsque les entreprises appartiennent à des États où lorsque des municipalités participent dans les transactions, des sources de politique économique considérées comme plus ou moins légitimes ou plus ou moins fiables ou vouées à l’échec.

Finalement, les mots comme « culture » et « mentalités » sont mobilisés pour désigner des identités professionnelles et non professionnelles, établies à partir des frontières étatiques, mais aussi en mobilisant différentes définitions, parfois diffuses et contradictoires, d’entités désignées par les mots « Chine » ou « Occident ».

En mobilisant les approches pragmatistes de l’argent, la présentation explore quels sont les imaginaires qui justifient, dans une géographie globale, des distributions de ressources monétaires hiérarchiques, observées dans les transactions, en montrant comment elles font sens et sont légitimées à travers des imaginaires politiques plus larges, qu’elles s’approprient, transforment, et contribuent à reproduire.

Horacio Ortiz est anthropologue, chercheur au CNRS, Université Paris-Dauphine (IRISSO, UMR CNRS 7170), et au Research Institute of Anthropology, East China Normal University, Shanghai.